
Coincée dans le désert 1/2
J’avais signé mon contrat. Seulement, certaines lignes de ce papelard invalide étaient restées sombres, et le fumier s’était chargé de les éclaircir une fois le piège de l’isolation extrême refermé sur moi.

Cela fait deux jours que je tente d’évacuer l’outback Australien, désert de sable ocre, peuplé de kangourous et de baobabs. Je ne suis équipée que de mes deux jambes et d’un sac à dos beaucoup trop lourd. Cette situation n’est pas le résultat d’un choix stupide et inconscient, non, c’est l’unique solution qui s’imposa à moi, suite à un différent de taille avec mon ancien employeur. Si l'on voulait résumer l'affaire à l'aide d'un terme technique approprié : je suis dans une belle galère.
Ce vieux fermier acariâtre pour lequel j’avais accepté de travailler était venu me chercher dans son Land Cruiser de ville, celui qu’il n’utilisait que pour regagner la civilisation, une fois tous les deux mois, afin effectuer les achats d’aliments et de produits divers qu’il ne pouvait produire lui-même. Cette fois-là, il était aussi venu pour récupérer sa main-d'œuvre, moi.
Lorsqu’il avait ouvert son coffre, j’y avais découvert un congélateur en état de marche qui servait à conserver sa nourriture sur le trajet de retour. Il était propriétaire d’une exploitation bovine, ainsi, il n’achetait qu'une grande quantité de légumes qu’il congelait tout de suite dans son coffre, afin d’en conserver beaucoup et longtemps. De cette manière, il s’économisait les aller-retour de 900 km depuis sa ferme jusqu’au supermarché.
Le coffre et le congélateur pleins, il nous avait ensuite ramenés chez lui, ses courses et moi, à travers les pistes pourpres et fumantes du désert qui défilaient à l’infini. Nous ne reverrions pas la civilisation avant au moins un mois, à l’occasion de ce même trajet, pour refaire les courses.
J’avais signé mon contrat. Seulement, certaines lignes de ce papelard invalide étaient restées sombres et le fumier s’était chargé de les éclaircir une fois le piège de l’isolation extrême refermé sur moi.
Je ne devais pas seulement travailler près de quatorze heures par jour, mais un loyer pour la chambre, que je partageais avec un nid de Red back, était retenu sur mon salaire déjà peu mirobolant. Je m’attendais à ce que les conditions soient extrêmes à cette saison. La plupart des journées de travail, physiquement harassantes, se déroulaient sous un soleil déchainé et des températures allant de 35 à 40 degrés. Mais ce détail, je m’y attendais. Je me doutais aussi de la dangerosité du terrain, ainsi, les consignes de survie en milieu hostile qui me furent dispensées sévèrement dès mon arrivée ne m’étonnèrent pas.
- Ne jamais descendre de mon quad hors de la piste.
- Toujours emporter au moins deux litres d’eau.
- Ne jamais quitter la ferme sans faire le plein et prendre un jerrican d'essence de secours.
“Essaie de rentrer à pied et tu as 50 pour cent de chance de finir tes jours ici.”